dimanche 4 mars 2018

Sladïnji


La bête est colossale. Elle mesure plus de douze mètres de haut et son pelage hirsute est d’une densité incroyable. Elle pousse des ronflements rauques qui semblent être le simple bruit de sa respiration. Ses yeux sont deux billes noires au scintillement humide. Sa truffe est un énorme champignon luisant planté dans l’immensité sauvage de sa face. La Bête soulève une indicible odeur de terre, elle a connu les premiers cailloux de ce monde et s’est roulé dans la boue opaque du Commencement. Ses crocs sont plus solides que le métal : des rangées de trophées tranchants, des dagues organiques jaunies par les siècles. Son souffle est un trou noir capable de faire tourner de l’œil une étoile car son haleine sombre est aussi fétide que cosmique. Dans sa gueule, entre ses dents sales, repose un monstre amphibien rose et noir, un fœtus visqueux de la taille d’une barque qui n’est autre que la langue de la Bête; une langue rugueuse et chaude qui lui sert à articuler le langage le plus vieux de tous les temps , à savoir : le silence. Autours d’elle c’est le brouillard. 

Face à elle ton ventre minuscule se tord de nausée et des sentiments les plus viles, du dégoût à la fureur en passant par une lâchetés animale, celle du rongeur couard qui fuit face à son prédateur. Tu avales ta salive une fois - tu avales ta salive deux fois. Autours de toi c’est le brouillard. 



1 commentaire:

  1. De l'encre virtuelle à la peau : je vous ai connue alors que j'étais ado, je pistais sur la toile, de blog en blog, chaque espace que vous inauguriez pour le dévorer, la nuit, c'est toujours la nuit que je vous lisais. J'ai aimé le saut des mots au grain de la peau.
    Vous avez écrit des lignes qui m'ont été précieuses. C'est une joie de croiser de vos mots d'aujourd'hui!
    Merci d'écrire encore. Je vous lirai longtemps.

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